1. Pouvez-vous vous présenter et nous dire qui vous êtes ?

Je suis Margot Degezelle, responsable des activités de Préservation du patrimoine naturel et aussi responsable Gestion des risques – Hygiène et sécurité à FREDON Hauts-de-France. Dans le cadre de mes études, j’ai suivi une Licence de Biologie des organismes à l’Université de Rennes 1 puis un Master mention Biodiversité Ecologie Evolution avec la spécialité Patrimoine naturel et biodiversité, dans la même université. J’ai effectué mon stage de fin d’études à la FREDON Nord-Pas-de-Calais, devenue FREDON Hauts-de-France, sur les méthodes agro-écologiques contre les ravageurs des fraises et des choux. J’ai ensuite enchainé avec un poste de responsable d’études en Recherche et Développement sur l’agroécologie en arboriculture fruitière et en cultures légumières puis en 2020 j’ai débuté sur mon poste actuel. C’est là que j’ai commencé à travailler sur la thématique des EEE.

Margot Degezelle
2. Quelles sont vos missions et enjeux dans votre poste (relatifs ou non aux EEE) ?

Je travaille sur ce poste depuis août 2020 et dans la structure depuis mars 2019 en comptant mon stage. Dans le cadre de mon poste de responsable des activités de Préservation du patrimoine naturel, mes missions sont séparées selon deux axes. Le premier consiste à accompagner les collectivités dans l’aménagement et l’entretien de leurs espaces verts pour réduire leur usage de produits phytosanitaires. En parallèle, un label (Charte + nature) a été développé au niveau national depuis 2021 pour valoriser les actions des collectivités et des entreprises privées pour la gestion de leurs espaces verts. Le second axe concerne les espèces invasives. Cela comprend les espèces exotiques envahissantes mais pas que. On travaille ainsi sur les rongeurs aquatiques envahissants (Ragondin et Rat musqué), la Berce du Caucase, l’Ambroisie ainsi que sur les chenilles processionnaires, qui ne sont pas exotiques mais bien invasives.

Pour mener à bien ces missions, on est soutenu par l’Agence Régionale de la Santé (ARS), le Conseil régional et la DRAAF.

L’ARS nous soutient aussi sur le Moustique tigre depuis début 2022. Ce projet est principalement de la sensibilisation et de la communication auprès du grand public. On sera ainsi amené à produire des outils de communication sur la nécessité d’éviter la propagation du Moustique tigre, à organiser des journées techniques et à intervenir dans les écoles primaires.


3. Comment, pourquoi et quand la problématique des EEE s’est-elle insérée dans vos missions ?

Historiquement, FREDON Hauts-de-France travaille sur les rongeurs aquatiques envahissants depuis les années 2000, en lien avec la santé du végétal. On utilisait encore les appâts empoisonnés à ce moment-là. L’objectif était d’arrêter l’usage de ces appâts et de passer à une lutte mécanique. L’arrêté du 6 avril 2007 relatif au contrôle des populations de rats musqués et de ragondins désigne FREDON et les GDON pour l’organisation de la surveillance et de la lutte collective contre les rongeurs aquatiques envahissants.

Par ailleurs, historiquement, FREDON a également travaillé sur l’identification du Frelon asiatique avec les préfectures du Nord et du Pas-de-Calais, les GDS et le GON. Cela ne concernait que l’identification car les autres aspects (lutte, communication…) étaient déjà couverts par le travail d’autres structures. De plus, en 2008-2010, grâce à un projet européen INTERREG financé par l’Europe et le Conseil régional, plusieurs fiches ont été produites, notamment sur la Coccinelle asiatique.

Quand je suis arrivée en août 2020, j’ai donc commencé à travailler tout de suite sur les EEE en continuant le travail sur les rongeurs aquatiques envahissants et en commençant d’autres sujets. Le projet sur la Berce du Caucase et l’Ambroisie qui s’est développé la même année avec l’ARS en est un exemple. Et cela continue puisqu’un nouveau projet s’initie sur le Moustique tigre depuis début 2022.

Finalement, une partie de nos missions sur les EEE découlent du travail de FREDON France avec le ministère de la Santé au niveau national. Les EEE à enjeux pour la santé humaine se sont donc naturellement insérées dans nos missions.

Ragondins sur l’étang de Pouilly sur Serre
Ragondins sur l’étang de Pouilly sur Serre ©FREDON Hauts-de-France
4. Quelles sont vos principales missions relatives aux EEE et sur quels aspects de la problématique des EEE êtes vous amené à travailler ?

Mes missions reprennent le triptyque de celles de FREDON : surveillance, prévention et lutte. On va ainsi communiquer et sensibiliser le grand public, les élus et les professionnels sur ces thématiques, aider à la structuration de la lutte contre les rongeurs aquatiques envahissants pour la rendre plus harmonieuse à l’échelle de la région et participer à la surveillance sur le terrain grâce aux prospections et aux données collectées par nos partenaires. On souhaiterait aussi développer la formation des gestionnaires et des collectivités à la reconnaissance et à la gestion des EEE sur lesquelles nous avons la connaissance et la compétence.

5. Aviez-vous déjà travaillé sur les EEE ? Qu’est-ce qui vous a attiré dans cette thématique ou ce poste ?

J’avais déjà travaillé sur les EEE dans le cadre de mes études mais pas dans la sphère professionnelle. Mes professeurs universitaires étudiaient des EEE comme la Jussie donc c’était une thématique que je connaissais déjà.

Ce que j’apprécie c’est que la thématique est à la confluence de plusieurs domaines comme l’économie, la santé, l’écologie… donc ça fait intervenir une multitude d’acteurs qui n’ont pas l’habitude de se voir et qui doivent pourtant réfléchir ensemble. C’est intéressant de travailler avec toutes ces personnes et d’essayer de répondre aux besoins de tout le monde.

6. Travaillez-vous sur les EEE animales, végétales, les 2 ou sur certaines espèces en particulier ?

Je travaille sur les deux mais sur certaines espèces en particulier : les rongeurs aquatiques envahissants, la Berce du Caucase, l’Ambroisie.

Dans le cadre des projets « Espaces verts », je peux être confrontée à d’autres espèces exotiques envahissantes et dans ce cas, soit j’ai la réponse aux questions posées soit je vais me tourner vers des personnes qui peuvent me conseiller. Le réseau des FREDON est très utile dans ces situations, c’est une véritable source de connaissances. Je peux aussi faire appel à d’autres partenaires comme le CBNBl ou les CPIE.

7. Vos missions vous permettent-elles de côtoyer d’autres acteurs régionaux impliqués sur la thématique ? Si oui, lesquels ?

Je ne pourrais pas tous les citer parce que je côtoie énormément d’acteurs régionaux. Parmi eux, les GDON, les associations de piégeurs, les Fédérations des chasseurs, les services de l’Etat, les associations naturalistes, le Conservatoire d’espaces naturels, les Chambres d’agriculture… En somme, tous les acteurs pouvant être confrontés à cette thématique.

8. Qu’appréciez-vous le plus dans le fait de travailler sur la thématique des EEE ? Qu’est-ce qui vous semble au contraire difficile ou désagréable ?

Ce que j’apprécie le plus c’est qu’on répond à des problématiques locales et malgré tout à différentes échelles (communale, régionale…). J’apprécie aussi beaucoup échanger avec les acteurs, l’objectif est, après tout, de communiquer et d’avancer ensemble. Ce qui est souvent difficile, c’est de convaincre. Malgré la communication et la sensibilisation à l’œuvre, tout le monde n’est pas convaincu et y remédier est complexe.

9. Parlez-nous d’un projet relatif aux EEE sur lequel vous travaillez actuellement ou que vous prévoyez de mener dans les semaines ou mois à venir ?

En ce qui concerne les rongeurs aquatiques envahissants, on continue à étendre la lutte collective à l’échelle des Hauts-de-France tout en continuant à soutenir les actions déjà en place dans le Nord et le Pas-de-Calais. L’objectif est d’harmoniser la lutte à l’ensemble des Hauts-de-France. Dans l’Aisne par exemple, la lutte existe mais n’est pas structurée. Notre travail vise, via cette structuration, à valoriser le travail des piégeurs pour les inciter à continuer à lutter.

Sur la Berce du Caucase et l’Ambroisie, en 2020, nous avons fait un état des lieux à partir des données des partenaires et des prospections menées sur le terrain. Ces données ont servi à faire une cartographie à l’échelle de la région. Aujourd’hui, l’objectif est de voir comment rédiger un plan d’action dans lequel les gestionnaires ont les clés en main pour prendre les bonnes décisions au moment d’agir, du moins pour la Berce du Caucase. En ce qui concerne l’Ambroisie, on parle surtout de plan de surveillance. On en est pour l’instant à la première rédaction de ces deux plans en parallèle. Des groupes de travail seront par la suite organisés. Je suis aussi en train de finaliser les premières fiches de communication à destination du grand public. En termes de sensibilisation, nous avançons aussi sur la communication relative au Moustique tigre.

Campagne de terrain 2021 – Berce du Caucase à Bondues
Campagne de terrain 2021 – Berce du Caucase à Bondues ©FREDON Hauts-de-France
10. Racontez-nous une expérience ou un élément qui vous a marqué en lien avec les EEE ?

Il y en a plusieurs. La première date de l’année dernière. On avait organisé la première campagne Bilan sur la lutte contre les rongeurs aquatiques envahissants à l’échelle des Hauts-de-France. La première qui rassemblait tous les acteurs de la région. Il y avait des personnes de tous les départements et de tous les horizons, ce qui prouve que la thématique rassemble.

Un autre fait marquant, c’est le webinaire qu’on avait organisé en novembre 2020. On avait également rassemblé beaucoup de participants régionaux.

11. Si vous deviez vous identifier à une EEE, laquelle choisiriez-vous et pourquoi ?

Je choisirais le raton-laveur parce qu’on ne connait pas vraiment ses impacts mais aussi parce qu’il est malin et qu’on le retrouve souvent dans des situations humoristiques. Il est en plus principalement localisé dans l’Aisne donc c’est un clin d’œil à mon département d’origine.

Raton laveur ©Pierre Sengez
Raton laveur ©Pierre Sengez
12. Pour conclure, concernant les EEE, quel est votre mot d’ordre ou philosophie ?

Il faut partir de l’optique que l’éradication totale n’est pas possible et donc que l’objectif est de contenir les populations et de limiter les impacts sur la biodiversité, la santé et l’économie.

Entretien réalisé par Marie ANGOT le 15 février 2022 en la présence de Margot DEGEZELLE.
Relecture
: Margot DEGEZELLE.
Mis en ligne le 31/03/2022.

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